Portrait d’Enolla

Volontaire en Service Civique à la MJC La Fabrique de Saint-Clément

À 20 ans, Enolla franchit sereinement un cap : celui où l’on transforme une passion en projet de vie. Volontaire en Service Civique à la MJC La Fabrique- de Saint-Clément – depuis un mois (après une année de bénévolat), elle a dit « oui » sans hésiter quand Alphonse – le directeur de la structure – lui a proposé de s’engager : aider, « mettre sa patte » et réaliser des projets, c’est exactement ce qui l’anime.

Discrète et anxieuse de nature, Enolla n’en est pas moins persévérante. L’accueil, l’info sur les stands, les photos d’événements : au début, « expliquer, parler aux gens » lui coûtait. Puis elle s’est forcée à sortir de sa bulle. « À force, on s’y habitue », dit-elle aujourd’hui avec un sourire. La MJC lui sert de terrain d’entraînement bienveillant : enfants, ados, adultes, aînés… elle apprend à s’adresser à chacun.

Sa langue maternelle, pourtant, reste l’art. Graphisme, peinture, illustration : Enolla crée des logos, imagine des visuels, peint de grands formats. Elle a conçu l’identité d’un groupe de K-pop local, CornFlower, puis a réalisé une toile monumentale à leur effigie. Voir son oeuvre accrochée sur scène lui a « fait des papillons » : fierté pudique, joie évidente. Avec les enfants (du CP au CM2), elle a monté un atelier peinture pour fabriquer le décor d’un petit théâtre : deux par deux, les volontaires se succédaient, impatients de participer. « Les enfants, ce n’est pas mon domaine à la base, mais partager une création et voir leurs réactions… c’est incroyable. »

En parallèle, Enolla nourrit un compte Instagram dédié à ses créations : toiles, dessins sur tablette, petits formats qu’elle dévoile « petit à petit ». Elle assume ce début modeste, rêve d’une communauté qui la suive, la soutienne, lui passe commande. Son rêve, justement : vivre de son art. Peindre le matin, dessiner l’après-midi, vendre ses oeuvres. Pour s’en donner les moyens, elle économise son indemnité de Service Civique et se renseigne sur une école spécialisée — Autograf, à Paris — en manga/animation et japonais. Les études l’ont parfois découragée, mais elle sait qu’un cursus aligné avec sa passion pourrait tout changer : « Dans un domaine que j’aime, je réussirai mieux. »

À la MJC La Fabrique, deux chantiers la galvanisent déjà. D’abord, un grand logo extérieur, peint en façade : des couleurs vives pour rendre la MJC immédiatement visible et attirante, malgré le bâtiment un peu austère. Ensuite, la salle de danse, qu’elle imagine rythmée de notes, de personnages en mouvement, d’ondes musicales. Elle a déjà griffonné des maquettes, réfléchit aux peintures adaptées, à la tenue sous la pluie : des réflexes de pro !

Derrière la réserve, on devine une détermination droite. Enolla sait demander de l’aide, accepte d’apprendre, progresse vite. Elle aime « faire plaisir », offrir un dessin, voir une salle s’illuminer grâce à un décor. Elle peut compter sur un écosystème précieux : Léa, sa meilleure amie depuis sept ans, également passée par un Service Civique à la MJC, et une équipe qui lui fait confiance.

Ce qui transparaît, au fond, c’est une métamorphose douce : parler un peu plus fort, oser proposer, prendre en main des projets qui dépassent la feuille A4. Enolla trace sa route, patiemment. Un trait après l’autre, un mur après l’autre. Et si le trac n’a pas disparu, il s’est transformé en moteur : celui d’une jeune artiste qui apprend à prendre sa place.

Entretien réalisé le 30 septembre 2025 par Sara Jourdin.